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5. Les contenus de l’inconscient …
Les contenus de l’inconscient. Supposons que l’inconscient soit un coffre. Nous serions curieux de savoir quel trésor il renferme. Peut-être cela nous en dirait-il beaucoup sur le sujet… Déception! D’abord, ces contenus sont ambigus, on pourrait dire ininterprétables en l’état où ils nous parviennent. Ils ne peuvent nous livrer leur sens que dans une certaine perspective. L’inconscient ne nous renvoie pas à une voix qui parlerait derrière notre voix, à une personne cachée qui se profilerait derrière notre personne manifeste.
Il faut prendre les choses sous un tout autre angle.
Lacan nous livre trois termes qu’il nous faudra comprendre et articuler entre eux : la vérité, la dimension de l’être, et cette notion de Kern unseres Wesens.
D’abord, la vérité. Ici joue la distinction fondamentale entre certitude et vérité.
La certitude est le constat de l’expérience immédiate. La vérité, c’est ce que nous sommes capables d’en dire. La vérité n’est donc pas une vertu transcendante, qui nous saisirait de l’extérieur. C’est une dimension essentielle de notre propre discours qui va au-delà de ce que nous disons effectivement, en tout cas de ce que nous croyons dire. C’est dans la dynamique propre de ce discours que nous identifierons les critères d’une vérité possible.
Et qu’en est-il de l’être ? Quand d’un individu on a tiré tout ce qu’il pouvait nous dire, il reste le mystère de son être-là. Mystère pour nous, mais surtout mystère pour lui-même.
Les contenus de l’inconscient constituent le noyau de notre être. Mais qu’est-ce qu’un noyau ? Encore un terme métaphorique. Un noyau, je ne sais pas ce que cela peut être matériellement, mais je sais que ce terme a une dimension topologique précise : c’est un point central. Et je pense que c’est de cette manière qu’il convient de le comprendre. Tout le reste s’organise autour de ce point et en référence à lui. Dès lors que le noyau est posé, tout constituant de l’être est défini topologiquement par sa position périphérique.
6. Le mécanisme à double détente …
Paragraphe très difficile, mais capital pour la compréhension de l’ensemble du texte. On ne l’éclairera que si on le rattache à ce qui a été dit du travail de la métaphore comme production du signifié.
Prenons acte également de ce fait qu’on tend à négliger : une interprétation ne donne jamais qu’un sens parmi bien d’autres et ce n’est pas forcément Le Sens, car tout signifiant est équivoque. En d’autres termes, la métaphore ne dévoile pas le sens, elle crée un autre voile qui lui même sera couvert par un nouveau voile et cela à l’infini.
Pour comprendre en quoi la métaphore est « à double détente », il faut revenir à ce que nous en avons dit. Dans un premier temps elle annule le signifiant figurant à telle place de la chaîne (effacement du nom de Booz), dans un second temps elle le restitue à un niveau supérieur de cette même place (sous la forme de la gerbe). On transcrit cela facilement dans le langage analytique : dans un premier temps, refoulement et/ou censure; dans un second temps, restitution à la même place sous la forme du symptôme.
En d’autres terme, le signifiant brut des contenus de l’inconscient doit être métaphorisé. Un signifiant de substitution doit venir prendre sa place dans la chaîne signifiante.
Mais suivons pas à pas la démonstration de Lacan. Nous placerons à l’origine du processus un signifant brut, le trauma sexuel. J’ai dit « brut », Lacan nous dit « énigmatique ». C’est quelque chose qui marque un point de départ et c’est traumatique et c’est sexuel. Pour autant, n’allons pas chercher du côté du viol, des abus sexuels. Disons simplement que quelque chose a eu lieu qui n’a pas « passé ». Quant à la sexualité, pensons simplement au complexe d’Oedipe. Or, ce qui ne « passe » pas, on le remâche sans cesse, d’une manière ou d’une autre. Le symptôme est la signification remâchée dans le présent, forcément inadéquate, d’une expérience énigmatique. Enigmatique veut dire ici : « Perçue comme un signifiant à interpréter coûte que coûte ».
Et cela vient s’emmêler dans la chaîne signifiante présente du discours ordinaire, le mot discours étant à prendre dans un sens tout à fait général, qui comprenne toutes les conduites signifiantes. Cette chaîne signifiante présente révèle des accidents, des parasites. Ces accidents en l’occurrence expriment un processus métaphorique : Le signifiant énigmatique du trauma sexuel s’est inséré dans la chaîne signifiante présente, s’est installé à la place d’un de ses éléments sous la forme du symptôme. Le caractère étranger du symptôme peut passer inaperçu aux yeux du patient, même si par ailleurs il dérange, quant à son interprétation, elle est inaccessible au sujet conscient.
7. Et les énigmes que propose …
Et nous en arrivons à l’une des apories de la réflexion ordinaire portant sur le désir.
On en fait une sorte d’élan naturel relevant de l’instinct. On peut se fabriquer ainsi une théorie des instincts, mais celle-ci ne pourra pas rendre compte des bizarreries, des paradoxes du désir humain.
Il ne s’agit pas ici de nier l’instinct, mais bien de comprendre sous quelles contraintes il déploie ses manifestations.
Nous retrouvons ici la métaphore des rails. Quelle que soit la puissance de la locomotive, elle ne pourra que suivre le chemin que les rails lui imposent.
Ces rails sont, nous dit Lacan, ceux de l’enchaînement métonymique, et cet enchaînement métonymique a la propriété remarquable de conduire le train du désir toujours vers autre chose. L’instinct pousse l’animal vers l’objet capable de répondre à son besoin. Les rails de la métonymie détournent toujours le désir vers autre chose.
Notons par ailleurs que ce mouvement du désir est semblable à l’enchaînement métonymique : un mot en appelle toujours un autre. On n’en a jamais fini.
Quand on a saisi un signifiant, on va tout de suite le prolonger d’un autre qu’on puisse lui associer, puis d’un autre, et encore d’un autre, c’est le mouvement métonymique. Et ce mouvement métonymique, qui veut toujours autre chose, peut aussi bien conduire à la répétition du même, parce parmi tous les signifiants que nous assemblons comme des légos, il y en a de froid et de chauds, de quelconques et de fascinants.
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1. Nul autre moyen de concevoir …
Le désir inconscient est indestructible, au moins jusqu’à la mort du sujet. Il se porte de besoin en besoin, de satisfaction imparfaite en satisfaction imparfaite. Parmi les besoins du sujet, certains ne peuvent être satisfaits que par d’autres sujets. C’est la règle de toute dépendance, laquelle est totale dans la prime enfance. Et il se trouve que certaines demandes se heurtent à un refus. En tout cas, dans toutes forme de réponse au désir il y a une part de refus. Ce qui est demandé dans le désir, c’est ce qui ne peut être accordé par personne, parce que personne ne le possède.
Remarque sur la mémoire de l’ordinateur.
La mémoire des signifiants est comme celle d’un ordinateur. Mais son contenu est fait d’insistances et non de données inertes.
2. C’est la vérité de ce que ce désir …
Le désir a une histoire et c’est en principe l’histoire de ses échecs, de son inaboutissement.
Mais attachons-nous au terme de vérité. Il nous faut évidemment comprendre ce que Lacan veut dire quand il use de ce mot.
La vérité, c’est ce que nous pouvons dire de ce qui est tel qu’il est.
Le symptôme est le signifiant qui vient occuper une place que le sujet retrouve chaque fois que son chemin de vie passe par le même endroit décisif.
3. C’est aussi pourquoi la psychanalyse …
Remémoration et non réminiscence au sens platonicien du terme. Il ne s’agit pas de se souvenir, mais de revivre. Il ne s’agit pas de retourner au passé, mais de saisir ce qui se passe dans le présent, dans ce que le présent a de décalé dans la mesure où il répète ce qui a déjà été vécu.
4. Il suffit de lire …
Toute accession à l’objet est dérivée d’une dialectique du retour.
Il n’y a donc pas conquête d’un objet nouveau, mais toujours tentative de refaire ce qui n’a jamais vraiment abouti.
5. Parti ainsi du nostos …
Le « nostos », c’est le retour au passé. La répétition, c’est le fait de revivre dans le présent les tentatives du passé.
Cette distinction est tout à fait déterminante. Freud, après avoir retenu la première orientation dans les premiers balbutiements de la psychanalyse a dû opter pour la seconde sous la contrainte des faits. Cette distinction est fondamentale. Dans le premier cas, il s’agit d’aller retrouver, à l’origine de la névrose, l’événement réel initial qui l’explique, événement dont l’identification devrait guérir le patient. Dans le second, il s’agit de mettre en lumière le nouage symbolique qui provoque ce blocage. On n’intervient plus sur le réel passé, mais sur le symbolique intermporel, donc toujours actuel.
6. Et comment concevoir …
Allons tout de suite à la conclusion : Freud, pris à contre-emploi par les données incontournables obtenues dans l’analyse a dû élaborer un mythe (et non comme il le croyait probablement élucider un mystère réel des origines).
Lacan insiste sur l’attachement de Freud pour Totem et Tabou, ouvrage peu en phase avec les préoccupations ordinaires d’un savant du 19e siècle.
Il s’agit du mythe du père primordial. Lacan décrit ce dernier comme un Deus ex machina, seul apte à soutenir l’intrigue telle qu’elle s’impose à nous.
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1. Aussi bien est-ce aux mêmes nécessités …
On revient ici clairement sur la fonction du mythe, lequel est à comprendre comme une création imaginaire nécessaire.
Lacan en cite deux autres exemples :
– La prolifération de créations symboliques particulières du névrosé;
– les théories sexuelles de l’enfant.
Je m’attarderai un instant sur cette notion de « création symbolique singulière ». Cela revient à se fabriquer une symbolique à usage personnel.
2. C’est ainsi que pour vous placer …
Remarque sur le petit Hans.
Son entourage ne lui a pas fourni les symboles fondamentaux qui lui sont nécessaires. En d’autres termes, il ne lui a pas indiqué les point clés du monde qui l’entoure et le sens à leur donner. C’est comme si le sujet devait franchir une zone dangereuse, par exemple un terrain pouvant à certains endroit se dérober sous le pas du marcheur, et qu’on ne lui avait pas appris à distinguer les secteurs sûrs de ceux qui ne le sont pas. Sauf qu’ici, ce sont les choses qui lui arrive, les manifestation de son propre corps qu’il ne parvient pas à interpréter.
Or, dans la lecture que fait Lacan de l’analyse du petit Hans, deux choses sont soulignées : a) La phobie est un cristal signifiant. Cette métaphore insiste sur le caractère stable et solidement structuré de la phobie, mais surtout qu’elle est un signifiant. Qu’est-ce à dire ? Ce n’est pas un message émis par le petit Hans, mais plutôt un message émis « à qui de droit » par une instance sans nom, celle-là même que Lacan appelle « le sujet ».
b) Le fait que tout l’enjeu symbolique est porté par un nombre limité de signifants et de signifiés qui s’échangent.
3. Opération où se démontre …
Cette observation du petit Hans nous montre donc comment le sujet humain se débat lorsqu’il est pris dans une impasse symbolique. Pour utiliser le langage de Lacan, il pose toutes les équations qu’il est possible de former avec les termes, en nombre limité, dont il dispose. Il ne s’agit pas de risquer des coups, mais bien d’épuiser une combinatoire.
L’observation du petit Hans est labyrinthique.
– Jusqu’ici, on n’avait utilisé l’observation du petit Hans que pour en extraire des matériaux de démolition. La formule est claire. Les matériaux de démolition sont ceux qu’on récupère une fois qu’on a défait une structure. Il ne reste plus que des élément non reliés entre eux. Or, nous dit Lacan, ce qui compte ici, c’est la construction bien solide, trop solide qui détermine la fonction de chacun de ces éléments.
Une remarque essentielle sur la névrose : elle se résout dans son propre développement. La recherche de la solution n’est pas comme une enquête policière qui ne commence qu’à partir d’un crime consommé. C’est un parcours d’interprétation qui accompagne et dans une large mesure provoque le développement de la névrose.
Définition de la névrose : question que l’être pose pour le sujet.
Nous avons ici une remarque capitale. La question n’émane pas du sujet, elle n’est pas posée par lui. C’est l’être qui la pose, c’est le fait qu’on est là. Etre là, être vivant, c’est être confronté à un certain nombre de questions essentielles. Des questions qui ne tiennent pas au sujet, mais au fait d’être là. Au moins ce questionnement fonde-t-il le sujet. Celui qui s’éveille en tant qu’interrogé par.
4. Il s’agit ici de …
Ce dernier paragraphe éclaire le précédent.
Où est l’être qui interroge ? Où est le sujet interrogé ?
La réponse est : au même endroit. Le sujet et l’être surgissent en même temps. En tant qu’il est, le sujet se constitue comme ce qui est interrogé par son être. Mais c’est plus que cela. Nous n’avons pas quelque chose qui gravite circulairement. L’être est une question qui est exprimée au moyen du sujet. La question est posée à tout le monde, à « qui de droit », mais le signifiant de la question est le sujet. Et il n’y a pas deux signifiants pareils.
Du sujet, nous allons glisser vers le moi. Il nous faut voir comment.
Notons tout d’abord que l’être pose la question à la place du sujet. Ici, « à la place désigne un lieu », le lieu où se trouve le sujet. On ne doit pas interpréter « à la place de » comme « se substituant à ».
On dira que l’être et le sujet se trouvant à la même place, ils se superposent. Or, le sujet est réactionnel à cette mise en question de l’être. C’est la dimension réactionnelle qui nous conduira au moi.
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1. C’est ainsi que Freud …
On peut donner une première définition du moi comme étant l’intégrale des résistances propres au sujet.
Pour Lacan, ces résistances sont de nature imaginaire. Pour comprendre ce que Lacan entend par « imaginaire », il faut se dire qu’il y a des images qui font simplement image et des images qui font sens. Les premières relèvent de l’imaginaire, les secondes du symbolique.
Les premières sont caractéristiques du monde animal. Ce sont des déclencheuses d’émotions (comme peut l’être encore pour nous l’image d’un serpent) ou de comportements (parade nuptiale, fuite). Lacan les désigne comme des leurres coaptatifs. Un leurre est quelque chose qui veut nous présenter comme étant telle réalité une simple image ou un signe évoquant cette réalité. C’est à la fois une apparence et un signe déclencheur.
Mais cela vaut pour l’animal. Pour les humains, c’est en gros la même chose, mais autrement. Le moi en tant que résistance est défini comme relation narcissique. En d’autres termes comme la capacité de se voir, de se repérer soi-même à l’extérieur de soi. Certain parleraient d’une tendance à tout ramener à soi.
On pourrait croire, en lisant Freud superficiellement, que le moi est la synthèse des fonctions perceptives. Il répondrait donc de la réalité. Tout dépend alors de l’endroit où nous situons cette réalité. La réalité, qui n’est pas le réel, mais le réel élaboré, n’est lui-même qu’une dimension du moi.
2. Car ce moi …
L’inconscient articule un message et le moi concentre contre ce message des inerties imaginaires pour le freiner, le travestir, voire l’empêcher.
C’est ainsi qu’on le conçoit et qu’on le définit. Reste à savoir comment il opère. Notons d’abord cette surprenante présentation du sujet comme déplacement.
3. C’est là la raison …
On peut dresser la liste des mécanismes de défense du moi.
Mais il faut bien se rendre compte qu’ils sont l’envers des mécanismes de l’inconscient. Si l’on dispose de l’opération qui le permette, il est possible, à partir de l’envers, de retrouver l’endroit.
Cet endroit nous est donné par le tableau des figures de style et des tropes de la rhétorique.
4. A s’obstiner à qualifier …
L’erreur consiste à renvoyer la résistance à une permanence émotionnelle étrangère au discours, comme si la résistance était une sorte de tension hors langage.
Ceux qui font cette erreur tentent de perpétuer une théorie fondée sur les instincts et une notion de l’inconscient comme part archaïque, non langagière de la psyché humaine.
Il s’agit donc d’accomplir la révolution épistémique à laquelle Freud nous invite.
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1. Or il est tout spécialement …
Le savant, le mage et le mège. Mège en moyen français signifie « médecin ».
Ce paragraphe contient toute une sociologie du savoir, sociologie que vient bouleverser la découverte freudienne. Le savant est celui qui détient le savoir, les autres sont ignorants. Mais plus encore, il importe au savant d’être le seul à savoir.
Par exemple, c’est au nom de ce savoir que le médecin, ayant ausculté un malade, identifie sa maladie et prescrit ses soins. Il y a une dialectique de l’ignorance et du savoir. On peut dire que l’ignorance du non-savant est indispensable à la définition du savant. L’analyste est donc un thérapeute d’une espèce particulière, puisqu’il est l’ignorant. C’est le patient qui sait, mais qui sait sans savoir.
2. Pour interpréter l’inconscient …
Interpréter l’inconscient suppose non pas un savoir particulier, mais tout le savoir, la somme de savoir qui circule en permanence dans le bourdonnement du langage.
Les Fanfreluche antidotée constituent le deuxième chapitre du Gargantua de Rabelais. C’est effectivement un poème hermétique faits d’allusions, de cirations, de calembours et d’équivoques. Les commentateurs s’y cassent les dents.
3. Il faut s’y résoudre pourtant …
C’est bien à l’interprétation d’un discours que l’analyste est convié. Ne pas croire que le discours ne soit que le camouflage du primordial. Tout est dedans et non pas au-delà.
4. Les livre que l’on peut dire canoniques …
Les trois ouvrages cités : L’Interprétation des rêves, Psychopathologie de la vie quotidienne, Le Witz dans ses rapports avec l’inconscient.
Ils sont définis comme canoniques (servant de norme, de référence) sur l’inconscient.
Il serait intéressant de voir ce qu’ils ont en commun. On tend à s’y intéresser pour ce que chacun a en propre : le rêve, les petits troubles de la vie quotidienne, le mot d’esprit. On ne met pas suffisamment en évidence que chacun d’eux porte sur l’inconscient pris dans ses diverses formations ou manifestations.
Pour Lacan, ils partagent deux éléments essentiels :
a) La formule de connexion et de substitution (métonymie et métaphore) qui nous renvoie au signe saussurien ;
b) Ils sont fait d’exemples analysés selon cette formule.
Mais il est un point ici nouveau, c’est l’insistance mise sur le mot Übertragung, qui dans la Traumdeutung signifie transposition et dans l’analyse transfert.
Et Lacan de nous introduire ici une nouvelle proposition : le signifiant a une fonction de transfert. Au sens le plus strict du terme, c’est un transporteur.
Le terme de transfert s’applique donc d’abord au rêve avant d’être appliqué à l’analyse.
5. De tels diagrammes …
Pourquoi Lacan utilise-t-il ici le mot diagramme ?
Ce pararagraphe nous indique l’’articulation essentielle. On relie ici ce qui a été dit des formations de l’inconscient à la question de la névrose, dans ses deux dimensions : le florilège des symptômes, un processus qui se déroule, un cours et une résolution.
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1. Et pour nous rabattre …
Ici Lacan évoque plus qu’il ne l’analyse, un exemple donné par Freud, des métamorphoses d’un signifiant.
La particularité du patient de Freud est que la satisfaction sexuelle était indissolublement liée pour lui à « un brillant sur le nez », ce qui paraît incompréhensible. Or, en allemand, brillant sur le nez se dit « Glanz auf der Nase ». Comme le patient avait passé sa petite enfance en Angleterre. L’expression allemande Glanz auf der Nase sonne comme « glance at the Nose ». Quant au nez, il n’est pas difficile d’y voir le phallus, symbole du « manque-à-être ». Nous avons donc alors le cheminement suivant : Satisfaction sexuelle -> Glanz + Nase -> glance + nose -> Nase/nose -> phallus.
Satisfaction sexuelle à condition de vérifier que le phallus est bien là.
2. C’est cet abîme ouvert …
Nous ouvrons ici, en conclusion de ce développement, la question de la résistance à l’analyse. Quelque chose a choqué dans la découverte freudienne.
En général, on dit que c’est la référence à la sexulaité. Freud aurait mis du sexe (pouah !) partout.
Pas du tout, répond Lacan. D’abord toute l’histoire de la littérature nous montrait déjà que le sexe est partout. Ensuite, et surtout, la psychanalyse, dans son évolution post-freudienne, a littéralement moralisé la sexualité en en faisant une sorte de condition du bonheur.
Le vrai scandale, c’est que là où il ne devrait pas y avoir de pensée, il y en ait : ce qui se fait entendre dans l’abîme, c’est une pensée.
3. Le scandale intolérable …
Le scandale, donc, est le fait que la sexualité relève de la pensée, qu’elle sature la pensée, qu’elle la subvertisse.
4. Au moment où les psychanalystes …
Et c’est même si scandaleux que les psychanalystes, refusant de faire le pas en avant auquel Freud nous invite, ont reconduit le clivage entre la pensée d’une part et le non-pensé profond, l’archaïque, l’animal, de la sexualité. Or, ce que Freud veut dire, c’est qu’à la place où je suis, ça pense, d’une pensée qui imprègne toute mon existence, à mon insu.
Pas de question cette fois, toujours aussi agréable de poursuivre cette lecture en compagnie de ton commentaire.